seule sur ton tandem

En cloque. Toi et ton foutu caractère, toi et tes sales manières. Pas assez mature pour avoir un boulot fixe, mais assez femme pour tomber enceinte. T’as fait des conneries, dans ta vie. Ce coup-ci, tu t’es surpassée. C’est la peur qui prend le dessus. Tu fais le bilan d’une vie merdique, et chaque souvenir qui passe te laisse un goût amer. T’as beau jouer les divas, tu sais même pas t’occuper de toi. Alors ce gosse, tu lui prédis une vie de misère. Ton père gueule, mais tu sais qu’il t’aidera. Il a pas un rond, mais le coeur sur la main. Ta mère pleure, tu lui as brisé le coeur. L’espagnole trop croyante pensait encore avoir élevé un ange. Si elle savait, maman. Ta vie est une succession d’échecs annoncés. Un karma minable, t’es maudite, pas un doute là dessus. On peut pas impunément se comporter comme tu le fais et espérer s’en tirer à bon compte. T’as merdé, tu le sais. Mais t’assumeras, comme tu l’as toujours fait.

T’aurais pu t’en défaire, de la môme. L’avorter, l’abandonner, la laisser aux parents. C’est pas les choix qui manquaient, au final. Et tu râles, tu sais faire que ça. Tu râles après une vie gâchée, une jeunesse bousillée. Une môme dont tu voulais pas, mais qui s’accroche à toi comme si t’étais son monde. Et t’as beau gueuler que c’est pas juste, au fond, tu te laisses séduire. T’es pas faite pour l’amour, Vera. Y’a pas d’âmes soeur pour les gens comme toi. Mais cet amour là, c’est autre chose. C’est ta gosse, ta chair et ton sang. Sa main refermée contre ton doigt, ton coeur enveloppé d’une niaiserie nouvelle. Tu pensais pas pouvoir vivre ça, ce flot de sentiments que tu t’expliques même pas. Ta môme, ouais. Alors quand la sage-femme s’inquiète encore de savoir ce que t’en fais, tu la serres contre toi comme le paquet le plus précieux qui soit. Ta môme, à toi.

Lou joue au parc, insouciante. T’as la clope au bec et la moue qui ne quitte plus tes traits. Lunettes de soleil pour dissimuler les excès de la veille. T’as trop forcé sur la vodka, la fumette, la ligne blanche. T’as jamais su t’arrêter, même la maternité n’aura rien su changer. T’es joueuse, un peu trop. Tu veux te prouver à toi-même que tu peux tout faire. Pas de limites, pas de pression. Et le lendemain, t’es seule avec tes regrets et une môme à élever. Tu peux pas continuer comme si t’étais toute seule, mais tu veux pas admettre que t’as une autre vie que la tienne à gérer. T’as jamais su être responsable. T’as jamais voulu. T’es comme un poisson hors de l’eau qui cherche son oxygène. Les excès, c’est ton air à toi. Faudrait voir à grandir, tu le sais. Pas pour toi, t’es irrécupérable. C’est à ta môme qu’il faut penser.